dimanche 31 janvier 2010

Le pays qui aurait pu être un modèle

Le Guyana pourrait être un exemple vivant d'intégration de populations variées et plus ou moins mixtes... Si l'on y pense, personne, à part les amérindiens, ne peut se revendiquer comme étant l'habitant d'origine. Personne ne peut se vanter d'avoir plus de droit que l'autre sur cette terre. Les amérindiens sont cantonnés dans des réserves, dans la forêt, et rien n'indique qu'ils veuillent mettre à la porte les autres habitants. Oui, ce pourrait être le paradis du multi-culturalisme, du mélange entre les origines... mais apparemment, cela n'est pas le cas.
Les indiens (on appelle ainsi les habitants venus d'Inde dans les bagages des anglais) comme les africains restent entre eux. Bien-sûr, il a des couples mixtes, à l'école, les enfants se mélangent, au bureau, on travaille tous ensemble. Mais on voit bien en traversant la ville qu'il y a des quartiers noirs et des quartiers indiens, que les indiens sont globalement plus aisés que les africains, que la misère colle à la peau des anciens esclaves... Il reste une antipathie sourde, qui se manifeste au moment des élections : les votes se font surtout sur des critères raciaux. On m'a raconté des histoires de chasse à l'indien lors de campagnes électorales un peu chaudes... Sous le pacifisme couve probablement une certaine violence. Dommage pour le modèle d'intégration !

Le responsable informatique du Ministère, voyant une photo d'une partie d'airsoft sur mon écran m'a dit un jour qu'il voudrait bien jouer lui aussi. Je lui ai donc expliqué en quoi ça consiste, et proposé de se renseigner pour savoir s'il serait possible d'importer des répliques. Après quelques jours, il m'a dit que ce ne sera pas possible. La violence a laissé trop de traces, les affrontements armés entre gangs, les morts et le banditisme, tout cela fait qu'on ne veut plus rien qui ressemble à des armes. Les forces de sécurité ne laisseront personne porter des uniformes et porter des répliques d'armes. On voit d'ailleurs sur certains portails d'institutions publiques des panneaux indiquant qu'il est interdit d'entrer avec des armes.

mardi 19 janvier 2010

Croisements, rencontres, voyages...


Mu par ce moteur des rencontres de hasard, des amitiés qui se tissent sous le ciel et les étoiles, je me retrouve un soir dans une famille en deuil. O. a perdu sa petite sœur. O. étant la meilleure amie de N., j'accompagne cette dernière faire une visite. Inutile de mettre des mots sur le malheur et la peine... Je suis là, assis parmi la famille et des amis, je comprends à peine ce qui se dit, j'observe, étranger étonné... Comme partout où la science n'est pas capable de donner du sens aux événements, comme partout où la raison n'offre pas de consolation, passe l'oiseau des ferveurs et des superstitions. La mort est venue du mauvais œil, due à une mauvaise querelle de famille, car il faut bien une explication...
Comme partout où se présente la faucheuse, les mêmes mots, les mêmes phrases à peine finies, les mêmes regards vides et perdus dans le lointain... Seuls les marmots ne connaissent pas le deuil, ils engloutissent des glaces et sourient, ils se bousculent et jouent dans la cour.
Le lendemain soir aura lieu la veillée ; je n'irai pas.

Rencontres, encore, provoquées par les retards des vols, le chaos engendré par les conditions climatiques inhabituelles : vols ratés ou annulés, une longue file se forme de voyageurs anxieux et impatients d'arriver à destination. La file, malgré sa forme linéaire, se prête assez bien aux dialogues, qui deviennent discussions de groupes... Celui-ci est canadien et va étudier en Italie, telle autre est fonctionnaire internationale et rejoint son poste en Inde, ces deux-là rentrent de vacances et voudraient pouvoir se remettre de la fatigue du voyage avant de reprendre le travail... Aussitôt formés, les groupes se disloquent, toutefois : chacun repart de son côté, filant vers son horizon familier ou vers des paysages nouveaux. On râle ensemble, on peste contre la mauvaise organisation, mais sitôt nanti de son nouveau billet, le voyageur oublie ses compagnons d'un moment. L'aéroport n'est pas un lieu de rencontre qui durent : on ne fait qu'y passer. Le temps qu'on y passe est suspendu, c'est un temps en dehors de la vie, en dehors de l'espace... C'est aussi pour cela qu'il est si tentant de céder à la tentation d'acheter. En ce non-lieu, suspendu hors de ma vie, si je ne suis plus moi, que ne puis-je me permettre de céder à une impulsion pour un bien aussi inutile que coûteux ? D'ailleurs, ne sont offerts à la concupiscence que des biens inutiles et coûteux, dans les aéroports ! Parfums à profusions, alcools raffinés vendus dans des bouteilles chatoyantes, bijoux qui n'ont de prestigieux que la marque et l'étiquette de prix, cigares et tabacs, tentants dans leurs boîtes exotiques... Luxe, temps perdu, illusion donnée d'appartenir à l'élite... Avec la démocratisation des voyages, il ne reste plus qu'une illusion, une légende exploitée par les marchands...

Vendredi avait lieu la fête donnée par le Ministère pour son personnel : déjeuner, puis après-midi dansant... grand défouloir où les distances sociales font semblant de s'abolir pour une après-midi... Le Directeur danse, les comptables aussi... tout le monde boit, l'ambiance monte tout au long de l'après-midi pour éclater dans un paroxysme de danse sensuelle et provocante, comme si l'énergie accumulée depuis si longtemps s'exprimait enfin... Dans les coins, et partout sur la piste de danse, les couples se forment et dansent lascivement, on se frotte, on se touche, on rit et on en rajoute... Puis petit à petit, tout rentre dans l'ordre et la foule s'effiloche comme descend la marée, laissant derrière elle un petit goût d'inachevé et rêve.