mardi 26 juin 2007

SEQUENCE EMOTION

Un matin comme un autre... Voila ce que c'etait, un matin comme un autre. Il y avait ceux qui perforaient des fiches pour les mettre dans des classeurs, celles qui traduisaient, une qui telephonait, moi, je sais plus trop ce que je faisais... mon plan de travail trimestriel, je crois.

Et puis, il y a eu un moment ou tout s'est ralenti, ils ont tous tourne la tete vers la plus jeune du bureau, les conversations se sont arretees d'un seul coup, il y a eu un court instant de silence, puis tous ont parle en meme temps. Hala, la plus jeune, est partie en courant vers la salle des imprimantes, les autres l'ont suivie. Sur leurs visages, il y avait une gravite que je n'avais jamais vue.

Ma collegue irako-canadienne s'est levee et a lache "un attentat suicide a l'hotel Al Mansour". Je me suis leve, je me suis dirige vers la salle des imprimantes, mais ils etaient tous dans un couloir. Je ne savais absolument pas quoi faire. Je ne veux pas importuner, mais je voudrais en savoir plus... je tourne en rond dans le bureau...

Puis, ils reviennent, l'air abattu...
La collegue dit "L'hotel Al Mansour, c'est la qu'ont lieu les formations, aujourd'hui! Ali et Ayad sont la bas !" les telephones mobiles ont surgi dans toutes les mains, se sont mis a resonner.

Rapidement, on a su que les deux formateurs, leurs assistants et les stagiaires etaient hors de danger. Mais le cousin de Hala qui travaille a l'hotel est blesse... elle s'accroche a son telephone, cherche a savoir... tous autour d'elle la soutiennent du regard, de la voix... Bushra, la chef de la division lui tend les bras...

Certains partent a la peche aux informations aupres des PSD, les autres essaient de travailler...

Le reste de la journee fut long, morne, et je dois dire que mon travail fut tres peu productif...

mercredi 20 juin 2007

PARANO FICTION !


A voir rester vides la liste de commentaires et ma boite e-mail, je peux soit deviner que le temps est trop agreable en France pour se coller devant un ordinateur, ou croire que l’Internet est affecte par un monstrueux virus qui bouffe au passage les innombrables emails qu’en realite vous m’ecrivez chaque jour…

Il y a peut-etre une autre explication, que je trouve bien plus satisfaisante, car tellement realiste… Tout concorde pour la rendre credible, alors que celle du virus, on voit tout de suite que ce n’est pas possible…

Ces dernieres semaines, le monde exterieur a l’Irak a ete completement englouti. Il ne reste plus rien de la realite que j’ai connue avant de venir me perdre ici. Simplement, pour ne pas desesperer Billancourt (enfin, Philippe, mais j’ai atteint un tel degre de paranoia que je peux bien me parer du nom de Billancourt… et de toutes facons, si vous n’existez plus, qui s’en soucierait donc !!!), pour ne pas desesperer Billancourt, disais-je donc, on a installe un ordinateur super puissant, dote d’un programme ultra sophistique.

Ce programme est capable d’analyser, a partir des mails, posts sur mon blog et autres conversations sur skype, l’ensemble de mon humeur et de mes emotions, puis de simuler des reponses appropriees, qui entretiennent l’illusion.

Toutefois, cet ordinateur n’est pas capable de simuler des messages autres que des reponses. Donc, si je n’ecris pas, je ne recois rien. Des lors, tester votre enthousiasme et votre envie de m’ecrire ne peut que me conduire au desespoir ! Et accroitre ma dependance au systeme de relations simulees !

Cette experience, digne des naufrages, (Lost) est d’une incroyable cruaute. Mais elle met a jour la relation de dependance qui se cree entre celui qui est loin et ceux qui sont restes. D’une part, elle accentue jour apres jour l’impression d’abandon, et d’autre part, elle recentre sur un nombre limite d’individus le nombre de communication emises. Sitot que je cesse d’emettre, le contact se deteriore. Il ne peut se regenerer qu’a mon initiative. Ce qui m’entrainerait, si je voulais maintenir tous les contacts, dans une epuisante activite de correspondance.

Cela montre bien, aussi, qu’on n’a pas forcement conscience, tant qu’on y baigne, d’etre dans un reseau de relations sociales tres denses et qui soutient notre vie personnelle, notre discours interieur se referant sans cesse a ces interactions simples et pourtant indispensables. Mais de meme qu’on n’a conscience de l’importance que de ce qui nous manque, c’est lorsqu’on est transporte hors de ce tissu, qu’on en eprouve tout le poids sur et dans notre vie.
Ce dont on n’a pas forcement conscience, c’est l’epaisseur de ce tissu, sa densite. En effet, on pourrait se recreer un reseau, mais il faut du temps pour recreer un reseau avec lequel on puisse evoquer des sujets personnels avec le meme degre de confiance.

Et c’est la que le programme de cet ordinateur de relations simulees m’impressionne : sa capacite a « deviner »le degre de confiance, la profondeur de la relation qui existe avec tel ou tel interlocuteur… ainsi que le ton, le type de langage, le vocabulaire, les sujets habituels… Ce qui suppose une puissance de calcul enorme, mais surtout des programmes d’analyse linguistiques et semantiques particulierement developpes !

Je voudrais me renseigner avec les collegues, pour verifier s’ils ont la meme impression que moi, a propos de ces relations simulees, mais je crains qu’ils ne soient des comparses de l’experimentateur cruel et vicieux… Car il est bien possible que rien n’ait disparu, mais que cette idee ait ete implante dans mon esprit, par des messages subliminaux, soit dans la musique qu’ecoutent les pretendus collegues de travail, soit a la pretendue television… comment savoir ?

vendredi 15 juin 2007

Un chaud silence s'est installe sur le compound


Avec l'installation du couvre-feu, nos collegues locaux ne peuvent plus venir, les bureaux sont deserts. Le personnel de maintenance, les gens qui font les travaux et tirent des cables ont laisse vide l'unique rue du compound... C'est comme un dimanche apres-midi, mais nous, nous travaillons.

S'il arrive a Saint Petersbourg que le vent charrie des lames de rasoir de gel, ici s'est leve un vent brulant, obstinement chaud, comme un ocean de flammes qui viennent lecher la moindre partie de peau exposee. L'ombre des murs de beton peut proteger du soleil, mais elle ne peut rien contre le vent. On annonce 48 C a la television. On reflechit a deux fois avant de se decider a traverser le compound pour aller manger. N'etait la promesse d'un peu de fraicheur a la piscine, je ne serais sans doute pas sorti de ma chambre cet apres-midi.


mardi 12 juin 2007

Du boulot et de ses rejouissances

Ca vous dit, quelques mots sur mon boulot ? C'est pas comme si vous saviez pas ce que c'est de bosser, mais disons que la, c'est un peu different de ce dont a l'habitude. Different par la taille, en particulier. Par exemple, un jour je disais que telle solution etait moins chere que telle autre, et la reponse a fuse "L'argent n'est pas un probleme, on a de l'argent"...

Le projet Tatweer est un projet de plus de 160 millions de dollars ; il a pour objectif d'ameliorer les performances de l'administration publique irakienne. Il est subdivise en deux parties. L'une est celle du conseil, ou des consultants travaillent aupres des Ministeres, pour ameliorer la productivite, la facon de produire des politiques publiques, des regulations et de la legislation...
L'autre, la mienne, organise des formations dans cinq domaines : Ressources Humaines, Gestion de Projet, Leadership et Communication, Gestion Financiere et Budgetaire, Planning Strategique. Nous avons pour objectif de former 38 000 fonctionnaires, sur trois niveaux le dernier etant celui de formateur.
Mon role est de coordonner les activites des trois centres regionaux de formation (Erbil, au Kurdistan, Mossoul, et Bassorah, dans le sud), ainsi que de m'assurer de la coherence des programmes sur le territoire.
Comme on en est a la mise en place des centres de Bassorah et de Mossoul, je suis plonge dans des dossiers de recrutement et d'achat de materiel...
Plus tard viendra la phase de lancement des activites et de suivi de formation, ce sera plus mon rayon habituel. Mais c'est interessant de faire des choses nouvelles !

Ce qui me donne l'occasion de poser a tous mes lecteurs une question posee par un collegue irako-canadien (avec un truc comme ca, je devrais voir des commentaires et des mails!!!) :
"A quand remonte la derniere fois que vous avez fait quelque chose pour la premiere fois ?"

mercredi 6 juin 2007

Quelques mots a propos de la sortie

Tout d'abord, il faut se mettre dans l'ambiance : gilet de protection et casque, assis sagement dans le gros 4X4, pas de conversation a haute voix, les PSD doivent pouvoir entendre par radio les informations qui viennent des autres voitures.
La voiture de tete avance droit, clignotants et sirenes a fond et les hauts-parleurs hurlent en arabe, des ordres de s'ecarter...
Nous, ceux qu'on appelle les clients, sommes dans la deuxieme voiture.
Derriere, un troisieme vehicule ferme la marche et fait en sorte que nous ne soyons pas des cibles au coeur de la ville !

Donc, ca ne traine pas, on ne musarde pas en route, a regarder les vitrines ou les parcs publics... Il y a bien des vitrines et des parcs publics, mais les unes sont bien pauvres et les autres a l'abandon...

Les rues sont sales, tristes, les gens ont l'air decourage, ils marchent les epaules basses, le poids du monde sur leur dos... L'espoir semble avoir deserte leur pays.

Parfois, de noirs fantomes traversent le paysage de poussiere, femmes mysteres, ombres de vie...

L'armee nationale est dans la rue, mais elle n'inspire pas, je dois le dire, la meme confiance qu'une patrouille americaine... Ces soldats irakiens ont l'air de figurants pour serie Z !

La circulation automobile est intense, anarchique, coloree, presque incoherente avec le reste !

La sortie se passe sans la moindre anicroche, on rentre a temps pour le dejeuner au compound, donc, tout va bien !

lundi 4 juin 2007

Bagdad, exterieur jour




















































De ma premiere sortie hors du compound, des photos prises a la volee, a travers la vitre du vehicule, sans cadrage, sans recadrage non plus, juste des instantanes silencieux...


A chacun de se faire son commentaire.



Pour ma part, en rentrant, quand les collegues irakiens m'ont demande comment j'avais trouve l'exterieur, les seuls mots qui me sont venus ont ete "devaste, triste, poussiere..."


More words in the coming days!

vendredi 1 juin 2007

Rubrique securite (2)


La, pose sur mon lit, mon gilet pare-balles et mon casque. Ce gilet pese un ane mort ! je me vois deja transpirant comme un boeuf sous le gilet et le casque, cet ete, quand nous irons en rendez-vous chez nos interlocuteurs irakiens ! Regulierement, quelque collegue irakien nous previent qu'en ete, la temperature depasse les 45 et va chatouiller les 50...
Sans compter que je ne suis pas sur que ca aille bien avec mon costume sable, ni meme avec le gris... Certains portent le gilet sous la veste de costume, histoire de garder un peu de dignite, je suppose, ou de confort... Bref, pour le defile de mode, on repassera!

Rubrique securite (1)


Voici l'un de nos gardes angolais... La photo a une histoire, bien-sur ! La veille, lorsque j'ai voulu faire une photo de la maison, il est venu vers moi et il m'a dit qu'il est interdit de faire des photos a l'interieur du compound et que si je suis vu par le responsable de la securite, il aura des ennuis. Ensuite, il a demande par talkie-walkie, si je pouvais faire une photo de la maison. N'ayant pas de reponse, il m'a laisse faire. Ensuite, je lui ai propose de faire une photo de lui et il a ete convenu qu'on la ferait le lendemain, pour ne pas prendre de risque. Il s'est donc mis devant ce mur de beton, pour qu'il soit impossible a quiconque verra la photo d'identifier le dispositif de securite du compound.
Depuis, chaque fois que je le croise, on echange un sourire...
Il voudrait bien partir en Australie, apres ce contrat, pour demarrer un business a lui, qui n'ait rien a voir avec la securite.
S'il vous plait, n'allez pas melanger ces gens avec des mercenaires : ils ne font en aucun cas la guerre, ils assurent la securite du compound, c'est tout.

Quelques images du paysage enchanteur ou je travaille (suite)

Le chantier de la mosquee inachevee. A l'origine, ce devait etre la deuxieme plus grande mosquee du monde.
Vue du toit, en regardant vers le nord. On a une vue interessante sur le compound, surtout les alentours des maisons, la ou l'on ne va jamais!

Vue du toit, en regardant vers l'est



Quelques images du paysage enchanteur ou je travaille !





Au loin entre les palmiers, la Tour de la tele