jeudi 31 mai 2007

Des mots venus d'ailleurs

Ce matin, une courte discussion avec deux collegues irakiennes... quelques mots venus de l'autre cote du mur du compound, quelques mots de ceux qu'on ne voit pas a la tele...
(J'espere ne pas trahir leur message)
"La vie en Irak est vraiment horrible : on se sent menaces tout le temps, on vit enfermes, on a peur pour nous, mais surtout pour nos enfants"
"J'ai envoye mon fils dans le nord, la ou c'est moins dangereux, mais il veut rentrer pour les vacances, je me fais vraiment du souci : ici, on sort acheter le pain et on risque de ne pas rentrer... Les garcons jouent dans la rue, et ils se font mitrailler..."
"On ne peut meme pas depenser son salaire : il n'y a rien !"
"L'autre jour, tous les membres du bureau, on est alles au restaurant ensemble, et on a passe la soiree a regarder par la porte si quelqu'un n'entrait pas pour tirer. Juste apres notre passage, il y a eu une fusillade dans la rue ou nous etions... C'est fini les sorties ensemble!"
L'une est chiite, l'autre sunnite. elles sourient en se montrant mutuellement du doigt : "c'est elle l'ennemi" "Pendant des siecles, on a vecu ensemble, mais a cause des americains, c'est impossible"
"Avant, on pouvait se retrouver en prison pour un mot, une blague, on pouvait se faire executer sans raison, mais on se sentait quand meme en securite, on pouvait vivre" "Maintenant, ce n'est plus vivre"
"Ma vie est fichue, je me fiche de mourir, mais mes enfants ont besoin de moi, il faut que je fasse attention pour eux."

Un collegue libanais a lui discute avec les gardes irakiens. A une exception pres, ils regrettent tous "avant". Meme celui qui a fait cinq ans de taule a cause du fils de Saddam, sans raison valable.

Et pourtant, ils font tous de leur mieux pour que la vie continue, ils emmenent leurs enfants a l'ecole ou a l'universite, ils viennent travailler, des fonctionnaires s'entassent a 38 dans une salle pour 25 pour suivre une formation Ressources Humaines...

lundi 28 mai 2007

Voila la Tatweer House, ou j'habite! Au mois six chambres, et je ne sais combien d'espace en cours d'amenagement pour des bureaux !
(Tatweer est le nom du projet, en arabe)

Une journee a peu pres typique

Ca y est, une semaine que j'y suis ! Comment s'organise une journee a peu pres typique pour le Training Coordinator que je suis ici...

A 7h30 sonne le telephone mobile, il faut deja se reveiller et aller a la douche... Vers 8h00, j'arrive au restaurant. The, saumon fume, oeufs brouilles, pain complet, ou parfois cereales... et ensuite, direct au bureau.

Selon les jours, reunions, mails, fiches pedagogiques a rediger, rapports a lire, encouragements au formateur qui part faire son seminaire...

Aux alentours de 12h30, descente au restaurant : chaque jour a plus ou moins son theme culinaire... aujourd'hui, c'etait l'Italie, demain je crois me souvenir que c'est Tex-Mex...

Petit passage rapide chez moi, pour un court instant de solitude, et retour au bureau. A peu pres comme le matin, en termes d'activites, jusqu'a 17 heures en general, sauf s'il y a quelque chose a finir en urgence.

Ce soir, en rentrant, j'ai voulu me reposer 10 minutes avant d'aller faire du sport, et j'ai dormi 1 heure ! Ensuite, cardio training, repas, ( vers 19h00, 19h30) et marche avec deux collegues. J'alterne la marche et la biere au bar ! Ce qui permet aussi de ne pas passer tous ces soirs avec les memes.

Puis vient le temps de skype, des mails persos, quand il y en a ( pas beaucoup, il faut bien le dire), et vers minuit, petite douche et dodo !

Et ca se repete six jours sur sept !

jeudi 24 mai 2007

Un peu d'air

Ce soir, en sortant du bureau, je suis monte sur le toit de ma villa... histoire de prendre un peu l'air. Faut dire qu'il fait actuellement 40 a 42 degre C... et que je manquais un peu d'horizon !

De la haut, on a une belle vue sur le chantier de la mosquee, qui devait etre la deuxieme plus grande du monde, mais qui n'a jamais ete terminee. Une vue sur le qurtier residentiel qui entoure le compound, aussi. Toutes ces villas ont du etre tres belles. Elles abritent des magistrats, des professeurs, des medecins... l'elite...

L'unique rue qui s'use sous nos aller-retours des le soir venu commencait a me fatiguer par le manque de vue... mais la cerise sur le gateau a ete la courte conversation avec le garde en faction sur le toit. Un angolais, qui m'a gentiment prete ses jumelles, pour jeter un coup d'oeil sur les environs. Il m'a explique ce qui se passe aux alentours, qu'il y a parfois des operations d'intimidation, mais rien de grave.

En bon individualiste, je me suis trouve un coin dans la villa pour lire et fumer un havane sans polluer ma chambre, un coin lecture... pour savourer en plein territoire de la pensee unique, quelques pages de Chomsky!

Disneyland - Bagdad

Ca m'a pris du temps d'arriver a Bagdad... du temps coince dans trois aeroports, du temps au bord de la piscine, aussi, il faut l'avouer...

L'avion qui devait m'amener a Bagdad le dimanche etait en panne, donc retour a l'hotel, sa piscine, ses chambres luxueuses, son atmosphere de palace international.
Quand le bus m'a depose a l'arriere du C130 qui nous emmenait a destination, j'ai ete saisi par le contraste ! Passer du palace a l'avion militaire, c'est un choc. Mais le choc s'est renouvele au debarquement. Aeroport militaire, donc plein de soldats US, exactement comme dans les films : le pas decontracte, la machoire en peine action de rumination... Jamais je n'aurai cru qu'ils mettent tant d'application a ressembler a l'image qu'on a d'eux !

Passons rapidement sur les heures d'attente dans la chaleur et la poussiere, dans l'ignorance surtout de ce qui allait m'arriver ; heureusement deux employes du Departement d'Etat ont bien voulu passer les coups de fil necessaire pour qu'on previenne quelqu'un de mon arrivee et qu'on vienne me chercher.
Passons aussi sur les heures a attendre un collegue qui rentrait de vacances par le vol de Dubai, et qui avait quatre heures de retard.

Bien sur, en arrivant au compound, j'etais completement desoriente. Je n'ai pas encore retenu tous les noms de ceux qu'on m'a presente ce soir la, mais ce fut tout de meme une tres bonne soiree.

Depuis, je decouvre mon nouvel univers, une prison de luxe de 200 m de long sur environ 50 de large, ou nous sommes peut-etre 200.
J'habite dans une villa, assez sympa, ou j'ai une chambre, bien isolee du reste, et confortable. Hormis un lit (immense), il y a une armoire et un bureau, une tele, une coiffeuse et un fauteuil...

La villa est situee a 150 metres du coeur du "village", le restaurant et le bar, ou sont aussi le coiffeur et la salle de sport. Le bureau ou je travaille actuellement est aussi tout pres du restau.

La vie sociale est assez intense, malgre la pauvrete des evenements a commenter. Il ne se passe rien, et ceux qui regardent la tele commentent les infos. Les autres racontent des blagues ou, le plus souvent, parlent boulot.

Pour tout dire, une fois enferme dans le compound, on ne sait plus si on est vraiment a Bagdad ou sur une ile americano-arabe ! Le decor et les langues qu'on entend le laissent a penser. La realite exterieure ne se manifeste que sous la forme de survols d'helicopteres, et aussi par l'omnipresence de gardes armes et de regles de securite draconiennes.

Il est donc facile, dans cet isolement (mais cela changera des que j'aurai a sortir pour vister mes interlocuteurs des ministeres et des centres de formation), de travailler et de prendre la vie du bon cote !

jeudi 17 mai 2007

Quand ça se précise

Vient un moment où l'on a vu presque tout le monde, où l'on a acheté les derniers trucs, où il faut se mettre à empiler ce qu'on veut emporter dans la valise...
Là, même entouré, on est seul ! Comme on sera seul à embarquer, seul à trembler à l'atterrissage (et s'il n'y avait personne pour me récupérer à la sortie!), seul pour s'endormir à Amman, seul à se demander à quoi ressemble un vol militaire sur Bagdad...

Mais cette solitude, ce n'est que la compagne habituelle du voyageur. Elle poisse un peu, mais, on la connaît bien. Même pas peur, comme on dit !

Alors, que vienne le moment où l'on va découvrir Bagdad, enfin, l'endroit dont on parle ! Qu'on en finisse avec cette inaction, cette attente...

mardi 15 mai 2007

Avant de partir


Allez savoir pourquoi, avant de partir, on songe déjà à comment ce sera là-bas, comment on va s'adapter, pourquoi on y va... Un rien d'inquiétude vient hanter la fin de mes nuits. Et si j'allais échouer ? Et si je revenais avant la fin du contrat, comment survivre à la honte ? Comment dire à la face du monde, je n'ai pas tenu le coup ?

Depuis deux ou trois jours, je cherche des informations sur l'Internet, j'essaie de savoir, de diminuer l'incertitude du futur.
Parfois, j'ai un peu peur... Mais chut, il ne faut pas le dire !


Mais dans le même temps, je sais bien que dès que l'avion va décoller, je serai dans l'action, il n'y aura plus de place pour les questions.

Mais avant, préparer la valise, faire les derniers achats, voir les potes...