vendredi 24 avril 2009

Une averse sur Kaduna




Ces images, juste pour donner une idée de la saison des pluies, sur Kaduna...

mercredi 22 avril 2009

Une visite impromptue à la Sécurité

Le Nigeria a mauvaise réputation, paraît-il. Mais on dit aussi que Kaduna est une ville tranquille. Et voilà qu'avant hier, puis ce matin, la réputation du Nigeria s'est confirmée, et celle de Kaduna en a pris un coup !

Il y a quelques semaines, un groupe de canadiens membres du Rotary traînaient à l'hôtel, visibles de loin avec leurs polos jaunes et l'air de sortir du magasin d'articles pour explorateurs tropicaux... Ils étaient apparemment venus pour distribuer des médicaments...

Et puis, va savoir ce qui est vrai et ce qui relève des rumeurs et autres fantasmes, une des membres du groupe aurait suivi un homme chez lui, et serait depuis retenue en otage. On parle d'une demande de rançon, mais par ailleurs on nous dit que le, ou les, ravisseurs n'ont pas pris contact avec les autorités...

La première alerte vient du réseau du consulat, qui joue bien son rôle et avertit les français de prendre des précautions : pas de sortie nocturne seul, pas de visite chez des gens qu'on ne connaît pas...

Deuxième alerte, ce matin, lorsque le coordinateur du projet vient nous chercher a l'hôtel pour nous conduire à la Sécurité. On voit que lui même n'est pas rassuré. Il y aurait aussi une histoire de photos prises dans la rue à Abuja...
Nous voilà donc, le chef de mission et moi, habillés en experts Banque Mondiale, à la Sécurité. On commence par nous faire attendre un petit quart d'heure, avant qu'un fonctionnaire tout sourire vienne nous chercher et nous accompagne dans son bureau, où sont serrés des fauteuils de jardin en plastique.
Il nous fait remplir des formulaires où l'on doit indiquer, outre la raison de sa visite dans le pays, le nom de son père et de sa mère, sa tribu d'origine, (pas facile quand on est tout mélangé), et autres informations destinées à nous sauver la vie si nous étions enlevés nous aussi... Il nous explique, toujours souriant, qu'ils ne veulent plus laisser d'étrangers errer dans l'Etat sans être identifiés, que cette affaire n'est pas bonne du tout pour la réputation du pays....
Il nous conduit ensuite dans le bureau de son Directeur. Celui-ci, prend un air grave, plonge son visage dans ses mains en s'asseyant dans son fauteuil directorial. Il nous remercie d'être venus et nous explique la raison de notre présence ici.
"Tout d'abord, nous dit-il, il y a les mesures à prendre pour assurer notre sécurité, à cause de cette affaire d'enlèvement crapuleux. Mais aussi, vous avez été vus prenant des photos à Abuja...
- Oui, des photos de la cathédrale et de la mosquée, dit le Chef de Mission
- Et cela a obligé nos gens à Abuja à chercher qui vous êtes, ce que vous faites au Nigeria... Ayant trouvé que vous êtes ici dans le cadre d'un projet d'assistance au gouvernement de l'Etat, nous avons compris que vous ne menez pas d'activités anti-nigérianes. Aussi, tout va bien, je vais vous laisser faire votre travail sans autre remarque. Je vous remercie de votre coopération."
En me levant, je remarque sur son bureau, un livre de dévotions, qui ne manque pas de surprendre le laïcard que je suis !

Le coordinateur du projet, Joshua, nous raccompagne à notre hôtel, avec la promesse de s'occuper au plus vite de la prolongation de nos visas.

Depuis cette visite, chaque fois que je monte dans le pick-up du projet, je verrouille ma portière..

mardi 14 avril 2009

le blanc, là

Le pire danger qui guette l'expert international, principalement en Afrique, c'est l'ethnocentrisme. Teinté d'une condescendance de bon aloi, il masque mal le racisme dont il est une expression autorisée, propre, basée sur l'expérience. Après 25 ans d'Afrique, on s'autorise à dire tout le mal qu'on pense de cette culture, dont le sous développement est l'essence.
C'est ainsi qu'on entend ce genre de florilège :
"Le sous développement, ce n'est pas le manque d'argent, c'est le manque d'intelligence. C'est parce que la moitié d'entre eux sont nés avec la moitié d'un cerveau qu'ils ne pourront jamais se développer"
"Ils n'ont pas la culture de l'excellence, ici, pour eux, tout est bien assez bon... Ils ne feront jamais, comme les japonais, le pas qui permet de se dépasser"
"Exactement comme le socialisme, l'islam est un système sous développant : on y pourchasse toute innovation"
"Ils sont tellement stupides que chaque fois qu'on leur pose une question, on dirait qu'ils tombent de leur cocotier"
"Combien de Prix Nobel ont ils reçu : zéro, c'est bien la preuve de leur incapacité à inventer. Ils ne sont bons qu'à répéter"

Comme si le développement ne pouvait avoir qu'une forme, comme s'il n'y avait qu'un seul bon mode de vie, le mode de vie occidental. Comme si l'Europe était un paradis où chacun se bat pour faire toujours mieux, pour servir son pays, son patron, sa boîte... Cette vision étriquée d'un monde noir et blanc, où le blanc est bon par essence, puisqu'il a inventé le moteur à explosion et le noir, par essence, nul, puisqu'il n'a inventé aucune technologie.

Comme si les différences de conditions générales géographiques, historiques, culturelles n'avaient pas de signification, pas de valeur...

Attention, qu'on ne se méprenne pas. je ne suis pas en train de verser dans l'angélisme tiers-mondiste. Il y a beaucoup à critiquer dans les systèmes politiques et économiques en Afrique. Je ne suis pas, et de loin, un spécialiste, d'ailleurs. Ce que je veux dire, c'est à quel point de genre de discours simpliste de la part de quelqu'un qui connaît par ailleurs bien le continent, est insupportable. Cette condescendance, qui fait que bien que s'installant sur le contient pour sa retraite, on critique les êtres sans distinguer ceux qui avancent et font avancer leur cause, leur pays, leur continent ou même simplement leur famille, de ceux qui ne font rien bouger. Comme s'il n'y avait que des Prix Nobel en Europe, que des génies à la peau blanche, comme si le reste du monde ne portait pas son contingent de nonchalants, de feignants, de menteurs, de niais, d'idiots...

dimanche 5 avril 2009

Trafic auto à Kaduna




Ponctuation


Après une parenthèse sans écrire, le clavier me démange à nouveau. Ce n'est pas qu'il se passe beaucoup de choses à Kaduna, ou dans le projet...
La pluie est arrivée depuis hier dans la nuit : le ciel se couvre progressivement dans la journée, puis, soit dans la nuit, soit en fin d'après-midi, les nuages se vident violemment sur la ville. Le fracas des trombes sur les tôles des toits assourdit tout et m'empêche de dormir.

Le rapport de démarrage du projet a été remis, j'ai embrayé la seconde, pour attaquer la revue fonctionnelle de dix ministères. Je dois constituer des groupes de travail, les former et les accompagner, avec l'aide d'une experte locale. Comme souvent, l'esprit travaille en tâche de fond, et on croit qu'on ne trouvera pas la solution du problème, jusqu'au jour où, vers 10 heures, le soir, enfin, la lumière se fait ! Oui, bien sûr, il faut faire une analyse des procédures, une analyse forces et faiblesses et rechercher les flux d'informations entre les unités de chaque ministère !
Chaque ministère est à peu près structuré de la même façon, avec son département finance, son département administration et ses départements techniques, qui lui sont spécifiques. Chaque ministère est complété par des agences de mise en œuvre, selon la mode anglo-saxonne. Mon analyse va porter principalement sur les procédures de gestion des ressources humaines, au sein des ministères et éventuellement entre les ministères et les agences.

Depuis quelques jours, l'Internet est des plus capricieux : on peut rester sans connexion pendant un ou deux jours, et jusqu'à ce jour, aucune solution alternative n'a fonctionné. On se sent vite isolé, voire déprimé, sans ce lien invisible et pourtant vital avec le reste du monde. Ces absences sont une ponctuation, comme une parenthèse dans la trame des jours : pas d'internet, pas de messages, pas de skype, nous voilà comme sourds et muets...
Reste le téléphone, les sms, pour ne pas rester seul...

Le patron de l'Alliance Française s'est mis en tête de me trouver un guide pour m'accompagner dans les soirées de Kaduna... Il semble avoir un carnet d'adresses inépuisable. C'est ainsi qu'il m'a fait rencontrer une muette extraordinairement ennuyeuse, que j'ai raccompagnée à la grande rue après un coca, histoire de savoir qu'elle était bien partie. Il finira par se lasser, je suppose...