lundi 26 octobre 2009

Guyana, un mois !

Samedi soir, le soleil va se coucher bientôt, la journée a été active : marché, courses au centre ville... un (petit) peu de ménage... Je me décide pour un petit tour sur la digue.

Je traverse l'autoroute, saute sur la digue et me dirige vers le soleil couchant. Les silhouettes des cocotiers se dessinent sur le bleu clair du ciel, les couples s'enlacent dans la brise humide... Samedi soir sur la Terre, un peu partout sur la planète, samedi soir est synonyme de détente, de liberté, de temps devant soi...

Je marche sur la digue, ma musique dans les oreilles, un grand sourire aux lèvres... les regards que posent certains promeneurs sur moi me rappellent que partout sur la planète, certaines choses vous collent à la peau... Et avec elles, des stéréotypes, des images toutes faites...
Bien-sûr, il est des endroits où il suffit de garder la bouche fermée pour ne pas avoir l'air trop étranger. Mais partout ailleurs, on n'échappe pas à la couleur de sa peau. Et aux clichés qui l'accompagnent...

Après le petit tour à pied, je prends une grande décision : assez de soirées passées à faire le légume devant la télé, assez de regrets le dimanche matin, de ne pas être sorti... Direction le restaurant chinois de Buddy's.
Buddy's, c'est un complexe de loisirs, avec la salle de muscu, un bar équipé de billards, un club, et le restaurant chinois où je suis installé. Une ambiance plutôt agréable et une cuisine fort sympa, même si elle n'est qu'une peu fidèle interprétation de la cuisine chinoise.

Pour ne pas rentrer trop tôt, je fais une station à la salle de billard. Même si je joue comme un pied, j'aime regarder une partie avec de bons joueurs. Bientôt mon attention est entièrement accaparée par une table où jouent deux jeunes filles, aussi maladroites l'une que l'autre. Elles sont toute une bande, à attendre les deux joueuses. La partie est lente, les deux adversaires se disputant la palme de la maladresse.

Sous toutes les latitudes, un homme blanc seul au bar finit toujours par attirer une jeune femme qui prétendra être selon les cas, une femme d'affaires, une femme indépendante ou autre qualité qui la met à l'abri du besoin... Un jeune femme qui finit en général par admettre qu'elle est prête à passer la nuit avec l'homme blanc solitaire, en échange d'une somme d'argent... C'est en général un sketch qui ne manque pas d'intérêt, car on peut en suivre les développements et en annoncer les étapes à venir sans grand risque de se tromper...

Si un blog pouvait servir de baromètre de l'humeur, en relisant les posts des dernières semaines, on verrait comment on finit par prendre ses marques dans un nouveau pays, un nouveau projet, on verrait les oscillations de mon humeur, de mon moral, et on pourrait presque voir se dessiner le plan des rues que je connais, dans mon GPS personnel. Le processus d'acclimatation est en bonne voie !

dimanche 18 octobre 2009

Guyana Semaine 3 - Diwali

Des pluies intermittentes viennent rafraîchir l'atmosphère, commençant comme des averses puis s'intensifiant jusqu'à devenir un bombardement d'eau... Le toit de tôle retentit autant qu'il le peut de la violence de ce bombardement. Lors des attaques nocturnes, je suis réveillé et je me demande à chaque fois de quoi il peut s'agir... avant de réaliser que c'est juste la pluie.
Si la pluie rafraîchit l'air, elle accroît aussi l'humidité et la moiteur. Pour éviter d'être étouffé par cette lourdeur, j'ai appris à vivre au courant d'air. J'ai appris aussi à dormir avec la climatisation. Le soir, c'est donc un plaisir chaque fois renouvelé de venir se glisser sous le drap augmenté d'une petite couverture, dans une chambre préalablement ramenée à 25 degrés !
L'air, parfois est si moite que je me demande comment il ne flotte pas des algues autour de nous. Il devient épais, étouffant.

Ces derniers jours, je suis allé me promener sur la digue qui protège la ville de l'océan. Soleil couchant, on voit une brume chaude enjamber la digue et noyer les promeneurs dans son atmosphère floue... ici, on dit que la digue est lieu privilégié pour observer les oiseaux. Il m'a fallu quelques jours pour comprendre que les oiseaux qui paradent sur la digue n'ont pas de plumes...

La digue est le lieu de promenade par excellence. On y trouve donc des bars transportables, qui se déploient en fin d'après-midi les vendredi et les soirs, de simples glacières et des triporteurs avec compartiment à glace... On y voit donc aussi des oiseaux et des chasseurs...

C'est sur la voie qui longe la digue, que s'est déroulé la parade de Diwali. Une longue théorie de chars illuminés, couverts de minuscules lampes. Musique indienne coulant à flots, petites filles en habits traditionnels posées dans des lotus de papier, cela me rappelle les corsos de ma région... Dès sept heures, ce soir-là, la voie était impraticable, tant les familles étaient nombreuses, massées sur le bord, nombreuses les voitures garées de chaque côté... Pétards, feux de bengale, et toujours les marchands ambulants...
C'est la fête de la lumière, Diwali, où la déesse Laxmi vient dans chaque maison. Comme elle vient pendant la nuit la plus sombre, chaque famille se doit de nettoyer et d'illuminer sa maison...

Dans la semaine, je suis allé avec John à une soirée organisée par un night-club... si l'ambiance est la même un peu partout autour du globe, la décoration ici mérite d'être mentionnée : grand et froid comme un hall de gare, rythmée de piliers recouverts de carreaux... le tout digne d'un club pour jeunes dans la patrie du socialisme !

Et puisque on en est aux petites choses surprenantes... Il y a ici, à la télé une chaîne qui ne passe que des annonces de décès : on voit une photo du défunt, sur une moitié de l'écran pendant que défilent sur l'autre moitié, les noms des membres de sa famille, ainsi que le lien de parenté... Si l'on ajoute les canaux qui diffusent, pendant de longs moments, les prêches des diverses religions et sous filiales... il faut avoir de la chance pour tomber sur un film... Et de la patience pour supporter les innombrables coupures publicitaires ! Sans compter que la plupart du temps, la coupure est double : les spots de la chaîne américaine qui diffuse à l'origine, puis ceux de la chaîne guyanaise... avec entre les deux, à l'écran, les indications du magnétoscope et des touches à presser... quand il ne s'agit pas de long blancs, avec écran vide et sifflement prolongé... Bref, la télé est une distraction même dans ses pires moments !

lundi 12 octobre 2009

Guyana, semaine 2

Quand la semaine 2 a commencé, il était grand temps de mettre sur papier les quelques informations qui j'avais pu récolter de mes lectures et discussionspour le rapport de démarrage du projet. Mais malheureusement, la lumière ne se faisait pas, rien, l'obscurité... Des questions, encore des questions... mais si peu de réponses... Ce n'est que jeudi que ma partie, celle des Ressources Humaine, du rapport, prit forme. A la fois photo instantanée de la situation et commentaire sur les lacunes organisationnelles, suivi d'un plan d'action pour la durée du projet.

Pour l'instant, l'équipe du projet se résume au Team Leader, John, et moi. Le spécialiste du Système d'Information Géographique, qui était là aux premiers jours est parti sur une autre île des Caraïbes, travailler pour un autre projet pendant un mois. L'expert britannique qui sera chargé du Système de Management Financier doit arriver vers la fin octobre.
D'ici quelques jours, le projet devrait s'installer dans des bureaux plus spacieux, recruter du personnel local, prendre enfin son envol...

Une des difficultés les plus éprouvantes ici, pour moi, c'est la prononciation locale de l'anglais : accents toniques placés différemment, prononciation différente de certaines voyelles... parfois, il me semble que je deviens sourd. Quelqu'un me parle, je comprends vaguement le sens général, mais impossible de répondre car il me manque le sens d'un mot clé... je me retrouve parfois dans des situations drôles, où l'on me pose une question et je ne sais même pas sur quoi porte la question !

La vie en dehors du bureau est assez monotone. Petites courses alimentaires, télévision, lecture, inaction... Aller au bar seul n'étant pas tellement mon truc, je ne sors pas... heureusement, il y a un club de muscu qui tient la route. J'ai pris un abonnement, et suis allé faire ma première séance d'entraînement. Ce qui est amusant, dans ces clubs, c'est qu'on finit par y retrouver à peu près le même genre d'individus. Cela va de l'adhérent qui veut être en forme, au Musclor avantagé par son héritage génétique... Chacun soulève ce qu'il peut de fonte, mais tous se regardent dans le miroir... bien-sûr, on se regarde dans le miroir pour vérifier que le dos est bien droit, le mouvement correct... mais qui peut dire qu'il ne regarde pas avec satisfaction ses muscles gonfler sous l'effort !
Qui peut certifier qu'il n'y a pas avant tout une satisfaction de l'ego, à voir se transformer peu à peu son corps, à voir saillir le muscle sous la peau, à voir se dessiner une nouvelle silhouette !
L'autre soir, un de ces athlètes exagérés soulevait des poids absolument délirants, des centaines de kilos, mais surtout en s'entourant d'un luxe de de précautions étonnantes : pour le développé couché, (je n'ai pas observé précisément, mais plus de 100 kg sans aucun doute), il emballait ses bras dans des sacs plastique, sous sa combinaison d'haltérophile.

Une chose continue de me plaire ici : la courtoisie, la gentillesse des gens. Des gens souriants, des gens qui vous donnent gracieusement un coup de main quand vous en avez besoin... C'est assez inhabituel, pour qui vient d'un monde stressé, où chacun vaque jalousement à ses propres occupations sans trop prêter attention aux autres... Même l'haltérophile sur-protéiné est venu me soutenir dans mes exercices, assurant la barre lorsqu'il pensait que je risquais de ne pas soulever mes 30 misérables petits kilogrammes et m'encourageant d'un "c'est bien, bon boulot..."

Je reviendrai sur les drapeaux hindous dès que j'aurai de l'information : je mène mon enquête !

lundi 5 octobre 2009

Guyana, semaine 1


Cette semaine a été une longue liste de première fois, ce qui est rassurant, quand on se dit que vieillir, c'est voir diminuer le nombre de premières fois potentielles...

Première fois sur le continent américain, premier vol transatlantique, première fois dans les caraïbes...

Éliminons d'abord les aspects négatifs, les impressions décevantes, avant de parler de Georgetown...

Déception, à l'aéroport de New York : tout est fermé, pour trouver un café ouvert, il faut marcher sous la pluie, explorer et finalement mettre la main sur une petite boutique de sushis dans un coin... l'impression de se retrouver dans un ensemble d'aéroports de province plutôt que dans un aéroport d'une (de LA) métropole ne m'a pas quitté.

Déception que mes bagages, ré-enregistrés à NY ne soient pas dans l'avion à Georgetown : l'image de l'efficacité américaine en a pris un coup, une fois de plus. Décidément, les amerluches ne sont pas à la hauteur de leur réputation de sur-hommes !

Déception que lorsque mes bagages sont arrivés, l'un était très endommagé, l'autre complètement trempé, les livres qui étaient dedans, devenus des éponges, les chaussures déformées, les vêtements totalement détrempés qu'il faut laver...

Venons en maintenant à mes premières impressions du Guyana.

L'air, tout d'abord, chaud, humide, lourd à respirer, pose sur la peu une couche de moiteur qui ne se défait jamais vraiment. L'eau, omniprésente, sous forme de rivières, de mares, de marais boueux, d'océan -sur la côte, s'entend- la terre, sous sa forme boueuse, qui donne aux rivières et à l'océan cette couleur maronnasse qui semble normale ici (quand on dit aux gens que même l'océan est boueux, et que c'est décevant, ils semblent ne pas voir de quoi on parle, comme si pour eux, la couleur de l'océan, c'est marron !). Le feu, quatrième élément, se manifeste surtout dans le disque solaire : dès lors que les nuages ne le masquent pas, le soleil écrase tout sur son passage, accroissant l'humidité de la peau...

Georgetown, c'est une grande ville sans grands immeubles, donc étendue pour pouvoir abriter environ 70 000 personnes. Comme la bande côtière où elle est située, la ville est globalement en dessous du niveau de la mer. D'où la nécessité d'un mur de protection. Les maisons sont construites sur pilotis, pour pouvoir, à l'origine abriter le bétail et autres activités agricoles, au temps de la première colonisation.
A mon arrivée, voyant des multitudes de drapeaux devant certaines maisons, j'en avais conclu qu'elles abritaient des pêcheurs, qui stockaient dans leurs jardins, comme les pêcheurs de Camargue, les bouées surmontées de drapeaux servant à délimiter leur zone de pêche. Il m'a fallu sortir de la ville, m'éloigner de l'océan, et voir encore ces drapeaux, ornés de franges dorées et de motifs graphiques, pour comprendre qu'ils sont en réalité les témoins de rites hindous !

En effet, la population guyanaise est une joyeux mélange d'origines : africains, indiens, amérindiens, portugais... et métis de toutes ces origines... tous vivants dans une apparente bonne entente.
Même si la réalité est sans doute plus complexe, comme me le dit mon team leader, les gens sont plutôt cools : hier, alors que je tentais de m'engager dans une rue en sens interdit, pas de klaxon, pas de gestes injueirux, pas de cris, un simple appel de phare pour me dire que je me fourvoie... Et la circulation continue...

Deux mots du boulot, pour finir la livraison de cette semaine : dans un monde idéal, il n'y aurait sans doute pas de consultants. Dans un monde idéal pour les consultants, ceux-ci recevraient des cahiers des charges exempts de toute arrière pensée, ils conduiraient des projets qui se dérouleraient sans problème, les rapports s'écriraient tout seuls, les bénéficiaires seraient contents dès la première version... Mais nous ne vivons pas dans ce monde, et le Guyana ne fait pas exception !