dimanche 24 mai 2009

Quelques mots sur Kaduna

Il est sans doute temps de dire quelques mots sur Kaduna, la ville et ses particularités.

Kaduna est la ville centre du nord, c'est là que les gens du nord se retrouvent, lorsqu'ils ont à discuter. C'est là qu'ils viennent s'approvisionner.
C'est aussi une ville "frontière" : elle compte à la fois des chrétiens et des musulmans, alors que le nord est majoritairement musulman, et que le sud est le territoire des chrétiens. Lorsqu'il y a eu des affrontements inter religieux, voici quelques années, les chrétiens ont marqué un coup d'arrêt aux massacres habituels, et résisté, pour la première fois.
Les églises prolifèrent, pour la plupart issues de scissions protestantes. "Eglise de l'Ambassade du Christ", "Eglise Charismatique", "Eglises de ceux qui n'ont pas honte du Christ", sont quelques noms qui ornent les bords des routes, sur de grands panneaux publicitaires...
Du côté musulman, il y a des chiites et des sunnites... chacun dans leurs zones respectives, et en général, il n'y a pas de tension particulière...

Côté économique, Kaduna, fut une cité industrielle, puisque Peugeot avait ici une usine qui fabriquait des 504. L'usine a été vendue à l'Etat nigérian, qui n'a pas maintenu sa compétitivité et n'a donc pas su résister aux véhicules japonais, puis coréens... Peugeot est toujours là, avec quelques cadres, mais l'époque de l'école Peugeot, du quartier Peugeot, du Club Peugeot est révolue.
Actuellement, l'usine Peugeot passe à la production de 307. Une équipe de français est sur le site, pour guider le changement de production.

C'est une occasion pour parler des français à l'étranger : prompts à critiquer, à ironiser, ils fonctionnent en petit groupes fermés dans lesquels on n'entre pas si l'on n'est pas conforme...

lundi 4 mai 2009

"Tu as pu te connecter?"

La question rituelle du chef de mission, chaque matin, "tu as internet, toi?" dit bien à quel point la ficelle qui nous relie au reste du monde est devenue essentielle tant au travail qu'à la vie des nomades que nous sommes...
Parfois, le soir, à quelques minutes d'éteindre l'ordinateur, je suis interpellé par un ami, un collègue, en mission quelque part sur la planète... "Tu es où ?", "Tu fais quoi ?", "Jusqu'à quand es-tu là-bas ?"... Questions banales de collègues qui font le même métier, connaissent la même incertitude sur le futur, savent que tout dont ils ont besoin tient dans une valise et un sac d'ordinateur...
Aussi, ce matin après le petit-déjeuner, lorsque la directrice adjointe de l'hôtel m'a annoncé qu'il n'y aurait pas d'Internet aujourd'hui, je n'ai pas pu m'empêcher de lui dire que lorsqu'elle me réclamera la note mensuelle, il se pourrait bien que mon règlement soit en panne, comme la connexion...

Ce week-end, pas de voiture (le chauffeur était parti voir sa mère malade, dans le nord), une connexion intermittente, pas la moindre compagnie... heureusement, il restait la télé, les livres, la salle de sport... Pas difficile de devenir asocial, dans de telles conditions !

Travailler dans un projet financé par la Banque Mondiale, je croyais naïvement que ce serait vraiment cool, que j'allais apprendre de nouvelles procédures... Et je n'ai pas été déçu : de nouvelles procédures, j'en ai découvert !
Ainsi, pour pouvoir organiser trois malheureux ateliers de travail avec les directeurs de services des ministères, il a fallu monter un dossier, qui a été soumis le 8 avril au bénéficiaire du projet (le gouvernement de l'Etat de Kaduna), en la personne du directeur de l'administration de l'Etat. Le coordinateur du projet a envoyé une demande de fonds, pour payer la location des salles et les repas des participants (on peut estimer généreusement le montant d'une telle opération à au moins 2000 euro). Et depuis, on attend... "Vous savez, les procédures de la Banque..." nous répond-on régulièrement avec un regard entendu...

Pour éviter de rester inactifs, nous avons commencé d'autres opérations (les "livrables", dans le jargon, qui n'est qu'une pauvre traduction de l'anglais "delivrables")... Et si les fonds n'arrivent pas, je contournerai l'obstacle !

Quand on pense que la plupart des projets sur lesquels j'interviens, consiste à améliorer la productivité de l'administration locale... C'est la Banque Mondiale, qu'il faudrait d'abord réformer !