samedi 15 décembre 2007

Persistance du bleu, entrecoupé de passages nuageux

Le vent secoue les palmiers, les nuages ont envahi le bleu du ciel, il doit faire frais, dehors... mais pourquoi sortir...
Décembre, et toujours pas de traces de guirlandes lumineuses dans le compound, ni boules de neige, ni Père Noël...
Se laisser dériver entre deux mondes parallèles, rêver, les images de France, où les gens portent des manteaux, et nous qui sortons juste en gilet, ou petites vestes, Noël et l'Aïd, les vacances qui s'approchent, les projets d'ailleurs, les achats, et le temps qui glisse péniblement et laborieusement, à peine perceptible, et pourtant...

Se tisse entre les habitants du compound une sorte de complicité, de sourire souterrain, de solidarité qui se devine à de petits signes. Qui télécharge de la musique pour la partager avec les autres, qui rapporte des biscuits de l'autre compound, qui prend soin de faire que chacun ait ce qu'il veut et mérite en matière de chambre dans le nouvel hôtel où nous migrons dans peu de temps... petits gestes qui font le groupe.

Il y a peu, la nuit, on voyait brûler une torchère de raffinerie de pétrole. La torchère a disparu, et avec elle une bonne partie de la raffinerie. Le journal des troupes US (Stars and Stripes) a prétendu qu'il s'agissait d'un accident industriel. Ils ont dit qu'il y avait eu une explosion vers les neuf heures du matin. Bizarre, ça brûlait comme l'enfer à sept heure quarante cinq... Et juste avant, on a entendu le bruit des explosions... Nous prennent vraiment pour des idiots ! Mais il est vrai qu'il faut rassurer l'électeur amerluche, lui faire croire que ça va aller de mieux en mieux...
Il y a une amélioration, mais ça ne veut sûrement pas dire que c'est fini !

A propos de futur, je commence à compter les jours, les jours à entendre les générateurs, les jours à manger du poulet, les jours à parler anglais, les jours suspendu à l'Internet comme à un filin de survie, les jours à attendre que le futur se dissolve dans l'improbable présent, avant de devenir un passé recomposé à la sauce du souvenir, noyé dans les mots...

La vie en France semble si irréelle, vue d'ici, même si je sais que je m'adapterai à nouveau en quelques jours, je ne peux vraiment m'empêcher de m'interroger. Qu'est-ce qu'aller et venir dans la rue? Qu'est-ce qu'avoir autour de soi de l'horizon à ne savoir qu'en faire? Qu'est-ce que changer d'horizon sans savoir à demander l'autorisation? Saurai-je encore entrer dans un café et passer une commande? Acheter et lire un journal?

Le réel ici est à la fois très simple et hyper compliqué ! Tout ce qui est hors des limites du compound, voire même, tout ce qui dans le compound est zone interdite aux clients, relève de l'abstraction. On ne peut même pas s'en faire une représentation visuelle fidèle, car tout ce qu'on en voie est limité, soit par la distance, soit par le cadre de la fenêtre de la voiture qui nous transporte. Le réel se limite donc a des murs en T renversés, à une alternance jour - travail - irakiens / nuit - repos - expats seulement, à des détails triviaux, ou a des relations humaines qui prennent une valeur et une saveur exceptionnelles. Le monde du dedans est presque noir / blanc. Le reste est écrasé sous le soleil et le ciel bleu.

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