lundi 24 septembre 2007

Paysage urbain



De mon bureau, je vois voler les hélicoptères; toujours par deux, comme des gendarmes... et je vois des antennes. Quelques palmiers, qui m'indiquent s'il y a du vent dehors. L'immeuble d'en face est à quelques centaines de mètres. Des gens y vivent. certains matins, les tapis sont suspendus aux balcons, parfois une silhouette apparaît sur le toit. Linge étendu, puis ramassé. On pourrait presque se croire dans la chanson de Nino Ferrer, "Le sud".... Si seulement il n'y avait pas ces hélicos, pour rappeler obstinément que ce pays ne connaît pas la paix.

Si je me lève du bureau et m'approche de la fenêtre, je vois une villa aux formes qu'un jour dans une réunion un architecte qualifia de déhanchées, une villa qui semble dormir dans la poussière. Une villa qui répète, un peu lasse, que la forme, la beauté, n'ont que faire de l'utilité et que tant qu'à faire d'habiter, autant habiter un bâtiment qui signifie autre chose que la simple fonction du logement.

Sa voisine est bien plus simple. Un détail attire toutefois immanquablement mon regard : un lit d'enfant, sur le toit - terrasse, un lit a barreau, qui a pu être bleu, un lit où n'a pas dormi d'enfant depuis longtemps... Et parfois, une femme qui nettoie la terrasse a grande eau... Seul signe que la maison n'est pas un fantôme.

En balayant le paysage du regard, toujours vers la droite, le parking où sont rangés les véhicules blindés des sociétés de sécurité des autres projets du compound. Gros 4X4 portants sur un autocollant, le numéro sous lequel est enregistrée la société à laquelle ils appartiennent. Blackwater, qui est dans les feux de l'actualité n'en fait pas partie. Les gardes des autres sociétés du compound sont pour la plupart des bandes dessinées vivantes. Loin du genre sérieux de nos Sud Africains, ils ont l'air de gros voyous à qui on aurait donné des armes et des grosses voitures. Je ne dis aucunement qu'ils ne sont pas professionnels. Je parle de leur aspect, qui ne m'inspire aucune confiance.

Juste au pied de l'immeuble, les générateurs électriques emplissent l'atmosphère de leur incessant vrombissement et de leur fumée malodorante. Carrossés de jaune, souvent ouverts à cause de la chaleur, énormes moteurs diesels, tournant sans répit pour assurer l'électricité de nos bureaux et autres chambres... Indispensables et insupportables générateurs... Lorsqu'ils s'arrêtent, qu'enfin l'Etat est capable de fournir un peu de courant, on a l'impression de découvrir la douceur du silence, comme une musique faite des bruits normaux d'une ville. Comme si Bagdad était une ville normale.

3 commentaires:

  1. Poétique l'image des héicos qui tournent par deux comme les policiers (les hirondelles ?).
    Dis moi, l'ambiance change radicalement ! En plus, plus d'apparition sur Skype, il semblerait que tu aies moins de temps à toi que dans ton installation précédente... Je me suis demandé effectivement en écoutant les infos si Blackwater assurait ta sécurité, auquel cas j'aurais un peu les boules, mais bon. Détail amusant, je rentre de 5 jours en Chine, et impossible d'accéder à ton blog, tout comme à deux trois autres d'ailleurs. Internet sous surveillance ?
    Porte toi bien.
    Patrick

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  2. Coucou Philippe!

    Et voilà, de retour au pays des fous. Je me demandais comment tu as vécu les vacances en France. As-tu ressentis un décalage entre le toi d'avant et le toi maintenant, entre tes amis, tes enfants, la vie française ?
    Sais-tu quand est-ce que la mission là bas va se finir ? Et comment penses-tu organiser ton retour, je parle psychologiquement?
    Je te crible de questions mais ça m'interresse de savoir comment tu vis tout ça, si tu y penses...

    Je te souhaite beaucoup de courage!!

    A très bientot! Bisous.

    Amandine.

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  3. Hello !

    Ben dis donc ! c'est une vie trépidante que tu nous raconte !
    heureusement que la poésie existe, n'est-ce pas ?
    cela fait longtemps que je ne t'ai eu sur skype ? tu as trop de travail ? tu fais trop la fête ?
    grosses bises (avé l'accent !).

    Yolande

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